La passion des meubles et objets anciens

Bonheur du jour

Bonheur du jour

Description de la restauration d’un bonheur du jour réalisée dans notre atelier.

 

 

Avant de décrire les phases de la restauration, parlons de l’origine de ce meuble si particulier.Le bonheur-du jour est un adorable petit secrétaire de dame nous apprend Guillaume Janneau . « Ce meuble est composé d’une table sur sur laquelle s’abat un volet déclive et que surmonte un petit serre-papiers à tiroirs et guichets. Son nom apparaît pour la première fois dans l’inventaire du mobilier du duc de Villars, dispersé en 1770. Le meuble n’est pas sensiblement antérieur, les ateliers l’appelaient d’un nom qui, lui fait image : la table à gradin ».

Son arrivée est saluée par un immense succès qui durera jusqu’au XIXème siècle à l’image du spécimen qui nous intéresse ici.

 

bonheur-du-jour-description-style-louisXVI

Bonheur du jour de style Louis XVI

 

 

Ce bonheur du jour n’est pas d’époque XVIIIe , mais de style XVIIIe car au regard des techniques de fabrications et des traces d’outils, ce meuble est d’une conception XIXe siècle, certainement de la période où le style Louis XVI était redevenu à la mode sous l’impulsion de l’impératrice Eugénie.

Éléments de datation de la serrure du tiroir.

 

La serrure est d’origine car l’entaille n’a jamais été modifiée : elle constitue donc un bon élément de datation. Quelles sont ces caractéristiques ?

Éléments de la serrure typiques XVIIIe :

  • Le palâtre et la têtière sont du même métal.
  • Le pêne est excentré, plutôt petit et presque carré.
  • Les bords du palâtre et du foncet sont chanfreinés.
  • La broche est rivée sur le palâtre.

Éléments de la serrure typiques XIXe :

  • Le matériau constituant les serrures est en fer laminé.
  • Les assemblages des cloisons sur le palâtre seront pliés ou soudés (ici pliés).
  • Les étoquiaux, typique du XVIIIe ont disparus.
  • 4 points de fixations de la serrure et non 3 points.

 

serrure-19e-siècle

serrure du XIXe siècle

 

En conclusion, la serrure est certainement de fabrication XIXe siècle avec une origine de ville moyenne en sachant que les techniques mettent parfois plusieurs dizaines d’années à arriver dans les provinces.

Constat d’état

 

 

Le meuble est structurellement en bon état, . Le placage, par contre, a subi quelques chocs qui ont provoqué, entre autre, quelques lacunes et de petits enfoncements.

Le gradin est décollé en partie du plateau de la table.

La surface du meuble est en mauvais état : par endroit des traces d’eau ou de forte humidité sont voyantes et dans d’autres cas le bois ainsi que le vernis ont jauni par exposition répétée à la lumière. Un décapage intensif de l’ancien vernis avec un traitement chimique des surfaces pour qu’elles retrouvent leur couleur d’origine seront nécessaires.

Les bronzes réclament un traitement particulier. Leur dorure est très endommagée, il nous faudra prendre la décision de l’enlever complètement pour retrouver la surface du bronze en dessous afin de le nettoyer puis de le vernir .

Dépose des bronzes

Dépose des bronzes

 

 

Le dessus de cuir de la tablette à écrire est à changer.

Le remplissage et le vernis gomme laque sont à refaire entièrement après avoir obtenu une mise en teinte du meuble qui unifiera la couleur acajou blond originelle.

Restauration du massif et du placage.

Des greffes de placage ou parfois de bouchage au mastic Araldite SV 427 ont été nécessaires pour redonner une bonne apparence au meuble. Le meuble a subi beaucoup de chocs sur le tiroir, ainsi que sur le plateau .

Le gradin fût recollé à la colle de poisson sur son plateau (voir ci-dessous).

Recollage du gradin

Recollage du gradin

Tous les bronzes furent déposés (voir photo en haut à gauche) . Nous les avons nettoyés et brossés avec une solution à 10% d’acide nitrique. Ils furent, ensuite protégés de l’oxydation par un vernis cellulosique (nous avons fait le choix d’ôter toute la dorure restante très abimée).

Un dégagement de surface « intensif » était nécessaire afin de retirer toutes

bonheur_du_jour_après_le_gommage

Bonheur du jour après le gommage

les couches de vernis successives qui avaient jauni le meuble. l’égrenage qui suivit fut tout autant appliqué afin de pouvoir retrouver au maximum les couleurs d’origines de l’acajou blond (voir ci-dessus).

Restauration du cuir de bureau.

 

Le panneau recevant le cuir fut nettoyé et poncé afin d’en recevoir un neuf provenant de la maison FEY à Paris (qualité agneau et collage à la colle de papier peint pour la réversibilité)

Mise en teinte et finition.

 

Nous avons dans un premier temps essayé d’atténuer les traces de jaunissement qui proviennent certainement du rempli altéré par le soleil et du vernis ancien. Pour cela une application légère de bichromate de potassium fut tentée . Après neutralisation, le résultat était satisfaisant. Concernant les zone blanchies par la présence d’eau ou d’humidité nous avons appliqué un peu d’acide oxalique.

La mise en teinte est réalisée par application d’un lait de teinte acajou ; elle vise surtout à unifier la couleur du meuble. L’opération reste délicate car il faut pouvoir doser la teinte en fonction des zones du meuble qui furent plus ou moins exposées au soleil.

Le remplissage fut laborieux, le meuble ayant auparavant subi un gommage intensif. De cette phase, dépend en grande partie, la qualité de la finition gomme laque que l’on obtient par la suite (voir photo ci-dessous).

remplissage-ponce

Remplissage à a ponce et à l’alcool

Un vernis gomme laque « fine orange » fut appliqué au tampon sur toute la partie haute du meuble. Les pieds, quant à eux, ont reçu une mattine cellulosique qui protège mieux le meuble des chocs et de l’humidité. La feuillure du panneau qui doit recevoir le nouveau cuir est poncée et aplanie afin de coller dans les meilleurs conditions, le cuir de vachette noir décoré d’une frise dorée.

Restauration d'un bonheur du jour