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Secrétaire droit

Secrétaire droit

Descriptif de la restauration d’un secrétaire droit (ou en armoire) en placage de loupe d’orme avec un intérieur plaqué acajou.

 

Le secrétaire en armoire que nous avons restauré possède les attributs d’une fabrication d’époque fin XIXe siècle. En effet, sa forme nous rappelle les secrétaires Louis Philippe qui se caractérisent par des montants arrondis et une corniche en tulipe surmontée d’un marbre gris ou blanc. On note cependant un souci extrême de simplification. Le seul décor se résume à l’emploi de filet de buis.

Le placage de loupe d’orme fut très fréquent sous la restauration. Par contre, tous les éléments de styles hétéroclites que l’on retrouve dans ce meuble peuvent s’expliquer par la mode du pastiche en vogue à la fin du siècle. L’intérieur plaqué en acajou de belle qualité ne fait que confirmer cette hypothèse.

 

Expertise du secrétaire

 

Nous allons ici faire une étude en profondeur du meuble. Cela permettra de valider l’époque de fabrication.

 

Le secrétaire avant la restauration

 

Mesures décimales : La taille du bâti semble tomber juste en cm. – L: 83 cm – P: 38 cm – HT: 133 cm L’utilisation du centimètre n’a pu réellement être imposée qu’à partir de 1851. Les tiroirs : La technique de fabrication est du XIXe siècle : 3 queues d’aronde à l’arrière avec l’arrière moins haut que les cotés. Utilisation du chêne est très fréquente à cette époque.
Les placages et les traces d’outils : Lors de la dépose d’une partie du placage afin de pratiquer des greffes sur les lacunes, nous avons pu constater la qualité de ce dernier: c’est un placage scié d’une épaisseur de 1mm environ.

Traces de scie au montant

Traces de scie au montant

 

La scie au bois montant a été inventée en 1799 ; elle permit aux ébénistes de leur éviter de débiter le placage à la main. Elle se répand en France dans la première moitié du XIXe siècle. Nous avons pu déterminer l’époque grâce aux traces de rabot à dent : 22 pour 2 cm signifie une fabrication tardive XIXe ou début XXe (voir ci-contre, en bas). Les queues d’aronde sont fabriquées à la main car on aperçoit les dépassements de coupe (Voir ci-dessous)

 

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Trace de scie à main

 

La technique de fabrication : Elle correspond parfaitement à une fabrication deuxième partie du XIXe siècle à l’image du croquis ci-dessous.

 

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schéma de construction du secrétaire

 

Les bois utilisés pour le bâti et les tiroirs : Les tiroirs sont en chêne et plaqués sur les devants. Les 4 montants et traverses sont en chêne et le reste du bâti est en peuplier sauf l’arrière. Il est à noter que le peuplier est utilisé autant que le sapin à cette époque.
Utilisation de la colle chaude est conforme à l’époque.
Les modifications:

Des modifications postérieures ont été effectuées sur le meuble. Cela a malheureusement détérioré la solidité de l’assemblage de la traverse du milieu de la façade. Le système de compas initial a disparu pour laisser place à un système beaucoup plus volumineux : il leur a fallu ôter du bois pour l’installer. En conséquence, la fixation du caisson intérieur du haut fut considérablement fragilisée .

 

Conclusion sur la lecture : Tous les points que nous venons d’analyser, nous mènent vers une fabrication fin XIXe environ.

 

 

Constat d’état avant restauration.

 

Le secrétaire nous est parvenu à l’atelier dans un très mauvais état, tant au niveau de sa structure que de son placage (particulièrement dans le bas) : L’humidité a largement favorisé l’apparition de pourriture fibreuse sur la plinthe et a donc entraîné de ce fait le décollement du placage. Un changement d’âme dans le bas est nécessaire et un “replacage” complet des côtés de la plinthe.
Élément du caisson intérieur arraché et cassé. Ce caisson intérieur doit être recollé et des greffes de placage d’acajou seront réalisées sur les lacunes.

Lacunes de placage et de massif

Lacunes de placage et de massif

 

La plinthe de façade est un peu moins endommagée . Un changement d’âme est cependant indispensable aussi.

 

État de la plinthe sur le devant

État de la plinthe sur le devant

 

 

Les portes sont cassées à plusieurs endroits, des greffes de massif et de placage seront nécessaires. La feuillure de l’intérieur de l’abattant qui permet de coller le cuir sera approfondie pour pouvoir accueillir le cuir d’agneau.

 

Porte avant la restauration

Porte avant la restauration

 

Des lacunes de moulures sont à déplorer sur le dessus (voir ci-dessous).

 

lacunes de moulure
La finition doit être complètement reprise après un dégagement de surface.

 

Restauration des vantaux.

 

Les vantaux du haut et du bas réclamaient un lourd travail sur la structure des panneaux et sur le placage de loupe d’orme. Par exemple, comme vous pouvez le voir ci-contre, un changement d’âme du panneau de l’abattant a été réalisé avant de pratiquer la greffe de placage. D’autres greffes de ce genre furent effectuées sur les portes du bas qui étaient aussi fort endommagées.
Restauration de la plinthe. Une grande partie de l’âme en bois massif de la plinthe côté droit a été remplacée (voir explication ci-dessous):

 

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Changement de l’âme d’un coté

 

Des changements moins importants furent réalisés sur le massif de la façade, avant de replaquer les côtés en loupe (voir ci-dessous et à côté)

 

Restauration du caisson.

 

Le caisson nécessita de nombreuses petites greffes d’acajou et un recollage du massif. Ce dernier était en effet très abîmé par le mauvais fonctionnement de la fermeture de l’abattant. En voici un exemple sur la photo ci-contre. D’autre part, l’ouverture des 2 tiroirs secrets fut réparée grâce à 2 greffes de massif.

 

 

Traitement de la pourriture cubique et fibreuse au Paraoïde B72

Traitement de la pourriture cubique et fibreuse au Paraoïde B72

 

Traitement de la pourriture fibreuse L’humidité fréquente sur le bois a pour conséquence en général le développement de pourriture cubique ou fibreuse qui désagrège la fibre de bois dans sa longueur. Les parties endommagées furent imprégnées de paraloïde B72, dilué dans de l’acétone. Cela permet de consolider le bois, de lui rendre une certaine dureté tout en stoppant les effets néfastes de l’humidité.

 

 

Restauration de l’intérieur de l’abattant. Tout d’abord, il fallut greffer certaines lacunes en acajou (voir ci-dessous), avant d’approfondir la feuillure destinée à accueillir le cuir de bureau.

 

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Greffe de d’acajou sur l’abattant intérieur

Le cuir de bureau

 

Le panneau recevant le cuir fut nettoyé et poncé afin d’en recevoir un neuf provenant de la maison FEY à Paris (qualité agneau et collage à la colle de papier peint pour la réversibilité)

Finition

 

Cette étape commence tout d’abord par un dégagement de surface réalisé avec un produit décapant sans soude qui respecte le bois. Tout le vernis est retiré sans pour autant supprimer la patine du bois. Le gommage permet de «gommer» comme son nom l’indique les rayures et les enfoncements provoqués par les chocs mais sans poncer complètement le bois. La mise en teinte des greffes a été faite chimiquement. Le meuble a subi la même mise en ton que lors de son arrivée à l’atelier: bois acajou légèrement teinté et la loupe est laissée dans son état de patine. Un léger remplissage des pores a été effectué à la ponce. Un vernis anglais fut appliqué au tampon afin de garder un aspect satiné au meuble.

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Secrétaire en loupe d'orme après la restauration