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Table en marqueterie

Table en marqueterie

 

Restauration d’une table en marqueterie de fleurs

La petite table de milieu que nous devons restaurer est le pur produit d’une excellente facture du XIXème siècle. A cette période en effet, les ébénistes hollandais se tournent vers les modèles du siècle d’or (XVIIème) en les adaptant à leur époque et en utilisant leur savoir faire ancestral en « marqueterie de jasmin ». Nous allons tenter de lister les éléments stylistiques qui caractérisent cette table :

 

  • Marqueterie de fleurs en bois de rapport « dans le goût hollandais ».
  • Le décor n’est pas conforme aux ornements stylisés du XVIIe siècle. Le style utilisé est plus naturaliste avec une moindre utilisation des rinceaux, des chutes de culots et autres feuilles d’acanthe.
  • Le pied rave est d’une inspiration lointaine des pieds d’armoire XVIIe.
  • Les pieds sont chantournés en plan et en élévation, cette technique ne fut inventée qu’au début du XVIIIe siècle.
  • Les tables volantes du XVIIe siècle possèdent très souvent un dessus « à cabaret » à l’image de notre table.
  • Les entretoises ne disparaissent progressivement qu’à partir du premier tiers du XVIIIe siècle. Sur la photo ci-dessous nous voyons une véritable table hollandaise du XVIIe siècle avec son entretoise.
  • photo ci-dessous, nous voyons une véritable table hollandaise du XVIIe siècle avec son entretoise.

 

 

Table hollandaise d'époque XVIIe siècle

exemple de table hollandaise d’époque XVIIe siècle

 

 

Dans ce paragraphe nous allons tenter de présenter une liste non exhaustive des techniques de fabrication qui nous confirment une fabrication XIXe siècle.

Utilisation d’outils mécaniques : On devine des traces de scie mécanique sur le fond du tiroir (voir photo ci-contre, en haut).

Les placages : Les placages utilisés sont sciés (technique du 19e) et on peut voir apparaître des restes de papier journal sous l’incrustation de la marqueterie du plateau.

 

 

trace de lecture

Traces de papier journal

 

 

Pourquoi du papier journal ?

Les marqueteurs utilisent le papier journal entre chaque feuille de placage collée en paquet afin de pourvoir les chantourner au bocfil.

Que peut-on en conclure ?

L’ouvrier a certainement oublié d’ôter le papier journal avant le collage à la colle chaude sur le dessus. Deuxième point : les journaux n’apparaissent qu’au début du XIX.

 

 

 

coullisage XIXe siecle

Au XVIIe, le coulissage se faisait directement sur un fond de propreté, lui même assemblé par queues droites sur le coté du bâti.

 

Au XVIIe, le coulissage se faisait directement sur un fond de propreté, lui même assemblé par queues droites sur le coté du bâti.

La technique de fabrication du coulissage des tiroirs : La technique de coulissage utilisée ici est employée au XIXe siècle (voir photo ci-dessous).  

 

Le bois massif utilisé : Le dessus ainsi que les pieds sont en acajou de Cuba ou de Saint Domingue, or il semble avéré que l’acajou apparaît dans les ports européens vers le début du XVIIIe siècle. Il ne fut, d’ailleurs, utilisé de façon massive qu’à partir de la 2eme moitié du siècle. La ceinture de la table et la façade du tiroir sont en chêne plaqué acajou. On peut observer que la patine et l’usure du bois massif ne ressemblent pas à un chêne du XVIIe.

La structure du tiroir : Les cotés du tiroir sont assemblés par une feuillure fixée par 3 clous. Le fond n’est pas embrevé par rainure et languette, mais cloué à plat. C’est une fabrication rustique qui pourrait faire penser à une conception du XVIIe (époque Louis XIV en France).

 

Les chants sont poncés au lieu d'être finis à la rape

Les chants sont poncés au lieu d’être finis à la rape

 

 

Finition des parties habituellement non vues : Traditionnellement les parties non vues, restent sans finition jusqu’au milieu du XVIIIe environ. Par exemple, les chants des moulures rajoutées aux coins de chaque pied devraient être brutes de râpe alors qu’ils ont un aspect fini sur cette table (photo ci-dessus).

 

Cette table dite « hollandaise » est donc inspirée des meubles XVIIe en marqueterie de jasmin, mais sa facture est typique du XIXe siècle.
 

 

 

Constat d’état.

 

Table avant la restauration

 

 

L’état général de la structure du meuble n’est pas mauvais. Seul un renfort sera nécessaire en dessous du plateau afin de circonscrire le début de fente. La marqueterie souffre, par contre de nombreuses lacunes et décollements. Afin de sécuriser les recollages de marqueterie sur la ceinture, un pressing à chaud sera effectué grâce à une nappe chauffante en silicone. La finition a grisaillé au fil du temps et mériterait une reprise complète. Les bronzes ne sont pas d’origine car nous pouvons observer plusieurs générations de trous de fixations des poignées de tirages et de l’entrée de serrures (voir photo). Ils seront cependant replacés à l’identique après nettoyage.

Restauration du placage.

 

Réhydratation des colles anciennes à la nappe chauffante

Réhydratation des colles anciennes à la nappe chauffante

Avant de procéder aux greffes, les lacunes furent nettoyées des reste de cire et de crasse (voir photo ci-dessous). Nous pouvons observer différents types de bois clairs utilisés dans cette marqueterie : du buis, du houx, de l’érable et de l’érable sycomore. Les greffes de marqueterie se déroulent toujours de la même façon. On prend d’abord une empreinte de la lacune, on découpe ensuite la greffe au bocfil puis on la colle à la colle chaude dans la foulée. En dernier lieu, quand toutes les greffes ont été réalisées, on pratique un pressing à Chaud à 65° pendant 20 mm, puis on laisse sous presse toute la nuit (voir photo-dessous).

Finition

 

Table après l'égrenage

Table après l’égrenage

 

 

Cette étape commence tout d’abord par un dégagement de surface réalisé avec un produit décapant sans soude qui respecte le bois. Tout le vernis est retiré sans pour autant supprimer la patine du bois.  Le gommage permet de « gommer » comme son nom l’indique les rayures et les enfoncements provoqués par les chocs mais sans poncer complètement le bois. Le meuble n’a subi aucune teinte à l’eau dans son ensemble afin de préserver le contraste des différentes couleurs de placages utilisées dans la marqueterie de fleurs. En revanche, nous avons pratiqué des réintégrations chromatiques sur certains détails de marqueterie. Cette action est réversible. Le remplissage des pores effectué à la ponce terminé, un vernis anglais fut appliqué au tampon.

restauratioon-table-hollandaise

 

 

 

 

Restauration d'une table en marqueterie de fleur